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Je me souviens à peine de ma naissance. Ma première, en
tous cas. Ma pierre angulaire. Elle est enveloppée de brume, boueuse comme les
marais de ma ville-berceau. Quelqu’un m’a sûrement engendrée ; les tours
et les flèches apparaissent rarement sans annonce, il me semble. Dans les échos
de ma nef, j’entends toujours le grattement de la plume sur le parchemin, les
lourds battements du marteau, les respirations laborieuses de mes créateurs.
Les petits détails me donnent une réelle existence. Je
prends ma première inspiration lorsque Gaultier cisèle ses initiales sur
l’une de mes pierres costales. Sa langue dépasse de ses lèvres et touche
presque les tâches de rousseur sur son nez. La lumière rebondit à travers ses
cheveux noisette et atterrit sur ma pierre fraîchement taillée.
« –Bonjour, je murmure en caressant son esprit.
–Bonjour, dit-il en souriant. Il essuie la sueur de son
front. Sa voix est incertaine. Il ne sait pas vraiment ce qu’il fait, mais son
tendre nom luit, gravé sur les millénaires.
–Heureuse de te connaître, Gaultier.
D’une main précise, il applique une nouvelle couche de
mortier sur sa pierre. Parmi la masse qui deviendra mes visiteurs, le bruit
m’apaise et m’ancre à terre. Douloureusement, gravement, je m’élève.
–De même, Madame. »
Quelqu’un m’a sûrement engendrée. Mais ma loyauté demeure
toujours auprès de mes enfants.
Ils me donnent des yeux. J’en compte trois, ronds et
brillants. Ils chatoient de couleurs pastel, dessinés avec un mélange délicat
de pierre et de verre. Avec eux, je vois ma ville-berceau. Je vois les
cheminées fumantes ; le palais ; l’humidité pavée de la cité. Enfin, je vois
mes enfants, immergés dans une lumière rose et bleue. Ils s’agenouillent ;
murmurent ; chantent. Se confessent. Ils viennent en processions, allumant
des bougies qu’ils ne peuvent s’offrir, parlant des langues que je ne comprends
pas. Je prie aussi, pour qu’ils puissent trouver les réponses qu’ils me
demandent.
Gaultier est parti depuis longtemps, mais son rire
résonne toujours dans le chœur. Il tournoie, souffle joyeusement sur les
bougies et les cheveux de mes enfants. C’est son cadeau d’adieu pour les
générations.
Ils m’offrent des bijoux et des couronnes d’épines, que
j’accepte comme une mère reçoit le cadeau de son enfant. Je n’en ai pas besoin,
mais si cela les rassure, s’ils peuvent se sentir moins seuls dans ce monde, je
peux vêtir mes murs d’un millier de tapisseries.
Ils ajoutent des arcs-boutants complexes, de peur que je ne m’effondre. Je ris. Bien sûr que je m’effondrerai. Je brûlerai, je m’écroulerai
et m’estomperai jusqu’à n’être qu’une dame de papier. Mais Raymond n’accepte
pas cela. Il donne des ordres, parchemin à la main, et compte ses pas en grattant
sur sa tablette.
« –Tu deviendras le temple le plus magnifique qui
se tienne sur cette terre », me dit-il. Son langage pompeux ne manque jamais de
me faire rire. « Tu seras aussi fine qu’une feuille de parchemin, mais tes
tours se tiendront fermes jusqu’au Dernier Jour. »
Sa main est ferme et stable. Il me tapote comme un animal
de compagnie, passant ses doigts sur les minuscules sillons entre les pierres.
(Il manque la gravure de Gaultier, que je cache envieusement.)
« –Mes sœurs ne le sont pas, essaie-je à
nouveau. N’entends-tu pas leurs cris, alors qu’elles tombent en miettes et en
flammes à l’Est ? Seules leurs ruines verront le soleil se lever au
Dernier Jour.
- –Pas toi, insiste Raymond. Tu es
meilleure. Tu es belle. Tu es sainte.
- –Plus sainte que toute la civilisation
que ton peuple massacre au nom de Dieu ? »
Ses yeux scintillent d’étoiles et d’hubris. Son menton
s’élève. « Oui. »
Mes enfants sont puissants et fiers, et se consumeront
pour effleurer le soleil.
Je me demande si c’est ce qu’ont ressenti mes sœurs dans
l’Orient.
Le trottoir est couvert d’une couche de sang. Ce dernier s’agite
autour de moi, à l’intérieur de mon
corps ; il crée des remous dans mes entrailles et me dévisage. Ils ne me feront pas beaucoup de mal ;
peut-être qu’en-dessous du regard froid de Raymond qu’ils haïssent tant, ils entendent toujours le
murmure d’espoir de Gaultier. Je n’ai jamais vraiment compris la haine, mais je sais qu’elle se dissout
rapidement avec la pérennité.
corps ; il crée des remous dans mes entrailles et me dévisage. Ils ne me feront pas beaucoup de mal ;
peut-être qu’en-dessous du regard froid de Raymond qu’ils haïssent tant, ils entendent toujours le
murmure d’espoir de Gaultier. Je n’ai jamais vraiment compris la haine, mais je sais qu’elle se dissout
rapidement avec la pérennité.
Ils pillent ma crypte ; décapitent mes rois et mes
saints. Mais je ne les ai jamais connus de tout façon ; ce ne sont que des
visages tatoués sans ma permission. Des bijoux factices. Les rois ne viennent
jamais me dire bonjour ; ils rentrent, s’agenouillent, sourient en coin, et
déclarent la guerre aux hérétiques.
Le coup de pied de Julien est nonchalant et
condescendant.
« Plus aussi puissante désormais, hein, ma
belle ? »
Il porte un tricorne bleu et rouge qui encadre gauchement
son visage enfantin. Il ne dépasse pas la vingtaine, et pourtant sa langue est
tirée comme s’il avait enfin vaincu un lion. Mais cela fait des décennies que
je n’ai pas parlé. Je retourne son appel.
« Jamais, » je réponds.
Julien sourit, et agite son petit drapeau.
« –Nous te
contrôlons maintenant, jubile-t-il. Tu ne pourras plus jamais nous faire du
mal. Tu seras oubliée, tout comme l’Ancien Régime.
- –Toi aussi. »
Avec un basculement lourd, la massue s’écrase contre
Saint Thomas. Sa tête explose, et les fragments s’éparpillent dans mes
entrailles.
« -Je te déteste », gronde-t-il. Sa respiration
s’effrite, et sa mâchoire bien taillée tremble dans son socle. « Tu es
tout ce qu’il existe de mal dans le monde. »
Je ne suis que pierres, ai-je envie de dire. Comment des
pierres, du chêne, du mortier et des initiales taillées peuvent-ils rivaliser
contre la trace fumante et sanglante d’un fusil ?
Mais il est déjà parti, courant sur les pavés, emporté
par la jeunesse et l’optimisme homicide.
Ils changent mon prénom ; il appartient tantôt à la
Raison, tantôt à l’Etre Suprême, tantôt à la Liberté.
Mes enfants sont
ingénieux et volages. Prêts à tout pour prouver qu’ils ont changé.
Mais une poignée de têtes décapitées ne change pas la
lueur flagrante dans leurs yeux.
Un homme aux yeux en amande et au front élevé comme le
mien se pousse contre ma lourde porte. Ses pas brisent ma trance, et je remue.
La lumière timide du soleil s’infiltre au travers de mon œil endormi. Mes
paupières clignent, doucement.
Le rire de Gaultier n’est plus qu’un murmure, maintenant.
Il a perdu sa mélodie, devenu aussi léthargique que la mienne. La promesse de
Raymond vole sur moi comme l’ange de la Mort.
L’homme souffle, propulsant une bouffée d’air frais parmi
les bancs. Il marche avec peine parmi les demi-ruines sur le sol. De la
poussière se forme dans les rayons diffus.
Il y a une aura autour de lui. Elle n’est pas
divine ; pas comme les rares prêtres qui se promènent parmi mes couloirs
endormis. C’est quelque chose de riche et de brun, parfumé de papier, d’encre
et d’étoiles. Ses yeux cherchent, clignent, et courent au rythme des rotations
de la Terre. Ses pieds sont fermement posés sur le carrelage en damier, mais sa
posture est légère et rêveuse. Charnelle et physique, mais pleine d’émerveillement.
Il n’est pas brisé ; pas encore.
Il sent intensément, décidément humain.
De l’électricité se dégage de ses doigts lorsqu’il les
passe sur ma pierre. Je frissonne. Je n’ai pas été touchée comme cela depuis
des siècles.
Prenant une inspiration, je guide sa main vers une petite
alcôve. Elle se cache dans la jointure des murs, couverte de poussière et
d’oubli. La respiration de l’homme se tait, et sa pomme d’Adam s’élève et
s’affaisse. Religieusement, il trace le G fatigué, le H maladroit. Il envoie des
picotements jusqu’à ma flèche, mais cela fait tellement plus de bien que la
torpeur d’inattention.
« Six-cent-cinquante ans, murmure-t-il. Nous devons
ressembler à des insectes pour toi. »
Je caresse sa peau en voyant ses yeux s’allumer avec les
Muses. Dans les entrailles de mes cloches, un doux grondement vient
l’accueillir.
« Pour moi, Victor, vous ressemblez à des
géants. »
Parmi tous ceux qui m’ont dit bonjour, c’est le seul qui
revient si brisé.
« –Regarde-toi, toute pomponnée, dit-il doucement. Tu es
une vraie dame de papier, maintenant. En route vers ton ancienne beauté.
- –C’est grâce à toi, mon amour. Ta belle
histoire a fourni l’étincelle. »
Victor sourit, un sourire las, timide, qui contraste avec
les cernes bleus sous ses yeux. Son dos est courbé, ses épaules tendues sous sa
veste.
Les labeurs de la rénovation résonnent dans la nef. Le
genou de Victor s’agite, rebondissant de haut en bas, de droite à gauche, en
synchronie avec mon battement de cœur. Il pousse de longs et faibles soupirs.
Sa tête se courbe un peu plus, de sorte que ses sourcils assombrissent son
expression émaciée d’ombres trop vieilles pour son âge.
Quelquefois, Victor me rappelle tellement moi-même que
je ressens sa souffrance jusqu’à ma crypte.
« Je suis tellement navrée, mon amour. » Je
lui envoie un tendre rayon de soleil, mais il tressaille, reculant brusquement.
Il prend une inspiration frissonnante.
« Elle n’avait… » Victor faiblit.
« Ma Léopoldine, elle n’avait que dix-neuf ans. »
Il gémit, et ses épaules tremblent. Jamais dans sa vie
n’a-t-il pu contenir les émotions de son visage. Mon Victor a toujours senti si
viscéralement, si férocement, que la force d’une centaine de feux ne pourrait
l’en empêcher.
Ses mains sont liées, et ses paupières se ferment ;
une tentative maladroite de connexion vers quelque chose bien au-dessus de ma
flèche. Je demeure silencieuse.
« Vous êtes censé tout savoir. » Ses lèvres
bougent, mais sa voix vient d’un autre monde. Ses sourcils tremblent. « Si vous êtes si omniscient, ne pourriez-vous pas au moins me dire… Me dire
pourquoi ? »
C’est la seule question à laquelle je ne peux pas
répondre ; à laquelle je ne peux jamais répondre.
« Pourquoi ne pouvez-vous pas la
ramener ? »
Ses sanglots ne résonnent pas. Les rires de Gaultier non
plus, ni les espoirs de Raymond ou le feu de Julien. Ils sont absorbés dans les
échafaudages, dans la lourde charpente en chêne, dans le mortier centenaire.
Demain, dès l’aube, à
l’heure où blanchit la cathédrale… Je partirai.
Parfois, j’aimerais parler à Dieu. Après tout, ne suis-je
pas nommée après sa mère ?
Peut-être suis-je condamnée à partager son destin ;
contrainte de regarder mes enfants se briser et mourir, suspendus au cruel
pilier du Temps.
C’est… pour le moins étrange. Je suis plus petite, plus
basse. Réduite.
La fumée et les cendres volent depuis ma flèche au-dessus
de ma ville-berceau, ma cité-lumière bien-aimée. Mes enfants sont coupés de
moi, me fixant, impuissants, derrière les pompiers qui murmurent. Ils prient,
ils chantent, ils soufflent des mots de réassurance que j’entends à peine
derrière les cris de mon esprit.
J’ai mal. La complexe charpente est consumée, les flammes
lèchent en bas de mon toit, les jets d’eau constants perforant mes épaules. Le
vent insatiable se jette contre mes murs, sifflant entre les tours. Il porte
les halètements des témoins lorsqu’ils voient ma flèche s’écrouler et empaler
mon flanc.
Une jeune femme fixe le brasier, sa mâchoire ferme et
stoïque maintenant une illusion de contrôle. Je peux à peine discerner la lueur
flagrante de ses yeux à travers la fumée.
« Ne t’inquiète pas. Nous te protègerons. » Sa
voix est tremblante, d’un ton plus aigu que d’habitude, mais sa main sur le
tuyau ne pourrait pas être plus stable.
« Tu dois avoir tellement mal », dit-elle.
Peut-être, mais ma douleur n’est pas intolérable. Celle
de mes enfants l’est.
Lorsque le soleil se lève sur mon corps toujours fumant,
j’entends le soulagement, et j’entends le chagrin. La ville, mon peuple
radiant, fier et arrogant, demeure silencieuse et épuisée. Le silence me
recouvre.
Ma presque-destruction a provoqué des milliers
d’individus à tourner leur regard vers un vestige de l’Ancien Régime.
« Nous rebâtirons », disent-ils. Depuis mon œil
intact, je vois leur chef, entouré d’une multitude de micros et de caméras.
« Nous restaurerons Notre-Dame à son ancienne gloire, et nous la rendrons
plus belle qu’avant. Nous rendrons la vie à ces pierres. »
La voix de Raymond résonne à travers des millions de
téléviseurs. Ses yeux transpercent le pays.
Je pense à l’affection transpirante de Gaultier, à sa
compassion enjouée.
A la colère de Julien contre les vices du monde, à la
courbe ardente de ces sourcils.
Je pense à l’écrivain Victor, à son beau sourire, ses
larmes magnifiques, et son amour inconditionnel pour l’humanité.
Je pense aux trois ou quatre milliardaires que je n’ai
jamais connus, qui prétendront me connaître en me parant de bijoux factices, en
me cajolant de bois impersonnel et de pierres mortes depuis longtemps.
Je pense à mes autres sœurs dans l’océan, dans les
forêts, dans l’air. Des cathédrales qui ne seront ni rebâties, ni retenues,
dans le petit contexte du pouvoir politique. Des monuments plus anciens que ma
ville-berceau, disparaissant d’un claquement de doigts, qui ne seront plus
jamais regardés. Tués par l’hubris, le dédain et le désintérêt général.
Mes pierres ne me donnent pas la vie. Tout comme vous,
elles se délabrent, s’effritent, et se consument.
Non. Je ne me rappelle pas le placement de ma pierre
angulaire.
J’ai pris ma première inspiration lorsqu’un jeune maçon
aux dents espacées a ciselé ses initiales sur l’une de mes pierres costales.
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I
can barely remember my birth. My first one, anyway. The cornerstone. It is
shrouded in mist, cloggy like the swamp of my cradle-town. Someone must have
fathered me – towers and spires rarely sprout up unannounced, I have gathered. In
the echoes of my nave, I still hear the scratching of quill over parchment, the
heavy bangs of the hammer, the heaving of my creators’ breaths.
The
little details give me real life. I take my first breath when Gaultier chisels
his initials on one of my rib vaults. His upturned tongue sticks out, almost
touching the freckles on his nose. The light bounces through his walnut hair
and lands on my freshly-carved stones.
“Hello,”
I whisper, gently caressing his mind.
“Hi.”
He smiles. Wipes the sweat from his forehead. His voice is tentative. He
doesn’t quite know what he’s doing, but his tender name glows, etched into the
millennia.
“Pleased
to meet you, Gaultier.”
With
a professional hand, he scratches another layer of mortar on his stone. In the growing
mass that will become my visitors, the sound is both grounding and appeasing.
Painfully, heavily, I rise.
“Me
too, my Lady.”
Someone
must have sired me, but my loyalty has always been to my children.
They
give me eyes. I count three, round and gleaming. They flash with pastel,
sketched with a delicate mix of stone and glass. With them I see my
cradle-town. I see the steaming chimneys, the palace, the paved dampness of the
city. I finally see my children, immersed in pink and blue light. Kneeling, muttering,
singing. Confessing. They come in processions, light candles most cannot
afford, speak a language I do not understand. I pray as well – that they find
the answers they ask of me.
Gaultier
is long gone, but his laugh still echoes in the choir. It spins around,
playfully blowing out candles and raising my children’s hair. His parting gift
to the generations.
They
give me jewellery and thorn crowns, which I accept like a mother concedes to
her child’s present. I don’t need them, but if they reassure them – if they can
feel less alone in this world – I can carpet my walls with a thousand
tapestries.
They
add more intricate buttresses, for fear that I fall. I chuckle. Of course I
will fall. I will burn down and crumble and fade until I am nothing more than a
lady on paper. But Raymond will have none of this. He
gives out orders, holding his parchment, counting steps and scratching on his
board.
“You
will become the most beautiful temple ever to stand upon this earth,” he tells
me. His pompous language never fails to pry a laugh. “You will be thin as a
sheet of parchment, yet your towers will stand strong until Judgment Day.”
His
touch is firm and steady. He pats me like his pet, running his fingers in the
tiny creases between the stones.
(He
misses Gaultier’s carvings, which I hide covetously.)
“My
sisters have not,” I try again. “Can you not hear their screams, as they fall to
pieces and flames in the East? Only their ruins will see the sun rise on
Judgment Day.”
“Not
you,” Raymond insists. “You are better. You are good. You are holy.”
“Holier
than the entire civilisation your people slaughtered in the name of God?”
His
blue eyes glint with stars and hubris. He jerks his chin upwards. “Yes.”
My
children are strong, and proud, and will burn themselves for a touch of the
sun.
I
wonder if this was how my sisters felt in the East.
The
pavement is coated with a thick layer of blood. It swirls around me, inside me,
churns my stomach and stares at me. They don’t do much to me – maybe, underneath the harsh gaze of the Raymond they so despised,
they can hear Gaultier’s murmurs of hope. I never really understood hate, but I
know it quickly dissolves under permanence.
They
plunder my crypt, behead my kings and saints, but I never knew them anyway –
they are all mere faces tattooed without my consent. Fake jewels. Kings never come to say hello; they just waltz in, kneel,
smirk, and declare war over heretics.
Julien’s
little kick is nonchalant, patronising.
“Not
so powerful now, huh, girl?”
He
wears a blue and red tricorn which awkwardly frames his childish face. He
cannot be over twenty, yet his tongue sticks out as if he had finally brought a
lion to its knees. Still, it has been decades since I have spoken. I nudge him
back.
“Never,”
I answer.
Julien
smirks, and waves his little flag. “We control you now,” he gloats. “You’ll
never hurt anyone else again. You’ll be forgotten, just like every other part
of the Old Regime.”
“So
will you.”
With
a giant, heaving swing, the rod comes smashing towards St Thomas. His head
explodes, and the fragments scatter through my bowels.
“I
despise you,” he snarls. His breath is ragged, and his chiseled jaw twitches
in its socket. “You’re everything that’s evil in this world.”
I
am only rocks, I want to tell him. How can stone, oak, mortar and carved initials
rival with the bloody smoke-trail of a musket?
But
he is already gone, running on the pavement, carried by youth and homicidal
optimism.
They
change my name – it belongs sometimes to Reason, sometimes to the Supreme
Being, sometimes to Liberty. My children are creative, and fickle. Anything to
prove that they have changed.
But
a few chopped off heads do not change the tell-tale glimmer in your eyes.
A
man with almond eyes and a high forehead like mine pushes through my heavy
door. His steps break my trance-like slumber, and I stir. Shy sunlight cracks
through my unused eye. I blink. Slowly.
Gaultier’s
laugh is no more than a whisper now. It has lost its music – has grown as
lethargic as mine. Raymond’s promise flies over me like the angel of Death.
The
man blows, sending a streak of fresh air over the piers. Dust materialises in
the diffused rays. He stumbles around the half-ruins littered on the floor.
There’s
an aura around him. Not divine – not like the few priests who still roam my
sleepy aisles. Something rich and brown, scented with paper, ink and starlight.
His eyes seek, blink, and dart in rhythm with the turn of the earth. His feet
are posed firmly on the checkered tiles, yet his posture is light and
dream-like. Grounded, physical, yet full of wonder. Not broken – not yet.
He
smells so intensely, decidedly human.
Electricity
courses through his fingertips as he brushes my stone. I shudder. I haven’t
been touched like this in centuries.
I
take a breath, and guide his hand towards the tiny alcove I made. It hides in
the joint between walls, covered by dust and inconsequence. His breath gets
caught in his throat, Adam’s apple bopping up and down. He religiously traces
around the tired G, the sloppy H. It stings up to my spire, but
tickling nerves feel much less lonely than numb inattention.
“Six
hundred and fifty years,” he murmurs. “We must look like insects to you.”
I
brush his skin, watching his eyes light up with Muses. Deep in the bowels of my
bells, a slow rumbling comes to greet him.
“I
think you look like giants, Victor.”
Out
of everyone who said hello, he’s the only one who comes back broken.
“Look
at you, all pampered,” he says. “You’re a proper lady on paper now. On your way
to your old beauty.”
Victor
smiles, a weary, tentative thing that contrasts with the navy bags under his
eyes. His back is hunched, shoulders drawn tight under his jacket.
The
clangs and thrusts of the renovation scaffolding reverberate inside the nave.
Victor’s knee fidgets back and forth, up and down, synchronised with my
heartbeat. His breath comes in long, trembling sighs. He dips his head a little
more, letting his brows cloud his gaunt expression with shadows too old for his
age.
Sometimes,
Victor reminds me so much of myself it sends sparks of pain down to my crypt.
“I
am so very sorry, my dear.” I send him a tender sunray, but he recoils –
flinches – away. He takes a shuddering inspiration.
“She
was…” Victor falters. “My Leopoldine, she was only nineteen.”
He
whimpers, shoulders trembling. Never in his life could he withhold emotions
from his features. My Victor has always felt everything so viscerally, so
fiercely, that the force of a hundred hell fires could not possibly restrain
him.
His
hands are linked together and his eyelids close – a small, awkward attempt to
connect to something far above my spire. I stay silent.
“You’re
supposed to know everything.” His mouth moves, yet his voice comes from another
realm. His brow twitches. “If you’re so omniscient, can’t you at least tell me…
Tell me why?”
That
is the one question I cannot answer, that I can never answer.
“Why
can’t you bring her back?”
His
broken sobs do not echo. Neither do Gaultier’s laugh, Raymond’s hopes, Julien’s
fire. They are absorbed in the scaffolding above, in the heavy oak framework,
in the centuries-old mortar.
Demain, dès l’aube, à
l’heure où blanchit la cathédrale… Je partirai.
Sometimes
I wish I could speak to God. After all, am I not named after his mother?
Perhaps
I am condemned to share her fate, forced to watch my children break and die,
suspended to the cruel post of Time.
It
feels…strange, to say the least. I am smaller, lower. Reduced.
Smoke
and ashes fly from my spire over my cradle-town, my beloved light-city. My
children are cut from me, staring powerless behind murmuring firemen. They
pray, they sing, mutter words of comfort that I barely catch over the screaming
in my mind.
It
aches. The intricate carpentry consumed, the flames licking up my roof, the
crashing water relentlessly boring into my shoulders. The tireless wind ramming
against my walls, whistling between my towers. It carries the bystanders’
collective gasp as they watch my spire crumble and impale my flank.
A
young fire woman fixes her gaze on the brazier, a stoic jawline firmly
maintaining her illusion of control. I can barely discern the tell-tale glimmer
of her eyes through the smoke.
“Don’t
worry. We will protect you.” Her voice is wobbly, with a higher pitch than
usual, yet her hand on the hose could not get any steadier.
“You
must be in so much pain.”
Maybe,
but my pain is not unbearable. My children’s is.
When
the sun rises over my still smouldering body, I hear relief, and I hear grief.
The city, my radiant, proud, boastful people, hang in exhausted silence. It
drapes over me.
My
close call to destruction caused thousands of individuals to turn their heads
towards an old remnant of the Regime.
“We
will rebuild,” they say. From my undamaged eye, I spot their leader, surrounded
by a shifting mass of microphones and cameras. “We will restore Our Lady to her
former glory, and make her even more beautiful. We will make these stones alive
again.”
Raymond’s
voice resonates through millions of television sets. His eyes bore straight
through the country.
I
think of Gaultier’s sweat-filled affection, of his cheery compassion.
Of
Julien’s anger at the vices of the world, of the passionate curve of his
eyebrows.
I
think of Victor the writer, of his beautiful smile and his magnificent tears,
of his unconditional love for humanity.
I
think of the three or four billionaires I have never met, who will claim to
adore me by bedecking me with fake jewels, by cajoling me with impersonal wood
and long-dead cold stone.
I
think of my other sisters in the ocean, in the forests, in the air. Cathedrals
that will never be rebuilt nor remembered, in the small scheme of political
power. Monuments older than my cradle-town disappearing with the snap of two
fingers, never to be seen again. Killed by hubris, disdain and general disinterest.
My
stones do not make me alive. Just like you, they decay, wither, and burn.
No.
I do not remember the placing of my cornerstone.
I
took my first breath when a young, gap-toothed bricklayer chiseled his
initials on the slabs of my rib vault.
–©Estelle Wallis, June 2020
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